Association Départementale des Gens du Voyage Citoyens de Loire Atlantique
Des clés pour mieux se défendre, connaître vos droits et devoirs, ainsi que de nombreuses lettres types pour vous aider dans vos démarches.
Depuis de nombreuses années, les Voyageurs et les associations qui les accompagnent font le constat, concernant les situations d’ancrage territorial des familles, d’une augmentation des situations conflictuelles et contentieuses d’urbanisme avec les communes. Or, quelle qu’en soit la raison, il y eut pendant longtemps des tolérances évidentes de la part de nombre de collectivités qui n’ont pas entravé l’installation de ces familles sur leur terrain familial.
Les élus leur ont laissé installer leurs caravanes, les ont laissé édifier – ils n’ont engagé aucun recours contre elles – des constructions, creuser des forages ou des fosses septiques sans aucune autorisation et ne se sont pas opposés non plus aux raccordements aux réseaux publics d’eau, d’électricité, voire d’assainissement. Que ce soit par ignorance, mauvaise foi ou indifférence des uns ou des autres, de nombreuses situations illicites au regard de l’urbanisme se sont accumulées au fil du temps…
Aujourd’hui, les textes et les comportements se sont durcis : c’est pourquoi les élus engagent désormais systématiquement des poursuites (pénales ou civiles) contre les auteurs de toute infraction à l’urbanisme. Ils le font parce que le droit de l’urbanisme a évolué, parce que des riverains ou leurs électeurs les y pressent, parce que les familles reconstruisent de façon imprudente leurs anciennes constructions en les agrandissant ou en ajoutent de nouvelles à leur guise, parce qu’ils ne veulent plus voir de « gitans » sur leur territoire…
Attention : construire à usage d’habitation sans autorisation est interdit et répréhensible pour tout le monde, voyageurs ou non. C’est une infraction, c’est-à-dire un délit d’urbanisme difficile à « justifier »… A contrario, affirmer le droit d’habiter de façon permanente, par choix ou par tradition, une résidence mobile sur un territoire en dehors d’une aire d’accueil, laisse sans doute plus de marges de manœuvre sur le plan de la défense judiciaire…
Dans pratiquement chaque contentieux, que ce soit pour une installation ou un raccordement, se pose toujours en filigrane la question de la légitimité d’habiter sur un territoire. Dans les procédures judiciaires engagées, les voyageurs, mal préparés, ne sont généralement pas armés et sont souvent les perdants avant toute audience. Comment se l’expliquer ? Peut-être parce que les gens du voyage ont foi en une morale humaniste ou une discrimination positive qui fera pencher la balance de leur côté.
Cependant, la justice oscille depuis toujours entre morale et légalité, elle penche le plus souvent pour la seconde. Il y a donc une nécessité de « s’armer » avec les outils du droit pour se défendre au mieux. En matière d’habitat mobile, les voyageurs doivent donc faire reconnaître la légitimité de leur situation. Pour y parvenir, ils peuvent s’appuyer sur la loi.
→ Que vous souhaitiez vous installer sur un terrain où la réglementation vous l’interdit ou réaliser des travaux d’aménagement (graviers, terrassement…), quel que soit votre projet, nous vous invitons à toujours effectuer auparavant une demande officielle écrite de déclaration préalable et attendre la réponse de la mairie pour le réaliser.
→ Dès votre installation, il faut vous assurer que vos conditions de vie s’accordent avec certaines conditions de décence de l’habitat et de dignité des personnes et demander à la collectivité compétente par une lettre recommandée avec accusé de réception d’assurer le ramassage de vos ordures ménagères (appelez l’ADGVC44 qui peut vous fournir un modèle), de faire raccorder à titre provisoire votre terrain au réseau d’eau et d’électricité.
→ Par ailleurs, dès votre première installation sur le terrain et avant même tout contentieux, nous vous recommandons fortement d’effectuer auprès de votre commune une demande officielle de terrain familial en remplissant le formulaire Cerfa 14069*03 de demande de logement social. Ce formulaire peut être aussi retiré auprès de la mairie du lieu d’habitation, du CCAS, de la préfecture ou auprès des différents bailleurs sociaux. Il est aussi possible de réaliser cette demande en ligne. Normalement vous obtiendrez un numéro national d’enregistrement à garder.
Téléchargez le formulaire Cerfa 14069*03 de demande de logement social. Ce formulaire peut être aussi retiré auprès de la mairie du lieu d’habitation, du CCAS, de la préfecture ou auprès des différents bailleurs sociaux. Il est aussi possible de réaliser cette demande en ligne. Normalement vous obtiendrez un numéro national d’enregistrement à garder.
→ Page 1 : « Votre conjoint ou futur co-locataire du bail » : à remplir (s’il y a autres colocataires, remplir les informations sur une feuille complémentaire)
→ Page 3 : S’il ya plusieurs colocataires, remplir les informations sur une feuille complémentaire
→ Page 4 : cocher « Logé en habitat mobile » pour le logement actuel si vous habitez en résidence mobile + cocher pour indiquer l’ordre d’importance des motifs de la demande :
(1) « Logement non décent » (sans eau ni électricité)
(2) Autre motif particulier, selon la situation, écrire : « Solution de relogement par la collectivité inaboutie »(si renouvellement de demande) ou « Jugement d’expulsion de fait de mon habitation actuelle »
→ Page 5 : Pour le logement recherché, cocher « Maison », le nombre de pièces souhaité (il faut que ce soit cohérent avec la taille de la famille), indiquer en premier la localité souhaitée et écrire dans les précisions complémentaires « Demande de terrain familial pour l’installation de mes résidences mobiles constitutives de mon logement permanent et principal »
Datez et signez. Faites une copie et gardez la. Il faudra renouveler la demande tous les ans.
En cas de contestation (même amiable) de la collectivité, notamment liée à votre mode d’habitat mobile, il vous faudra aller chercher dès que possible, chaque semaine ou quinzaine, auprès d’une ou deux aires différentes existantes à proximité de votre terrain (15 à 20 km), une attestation du gestionnaire indiquant qu’il ne peut accepter votre entrée au regard du manque de places. Si l’aire est fermée, faire une photo ainsi que du panneau d’affichage en donnant l’information.
Gardez bien tous ces documents précieusement, ainsi que les preuves d’expédition, de réception et les réponses reçues, ils pourraient vous protéger d’une sanction judiciaire sévère.
La démarche proposée est susceptible d’organiser votre défense lors d’une procédure judiciaire visant à vous faire expulser du terrain où vous êtes installé de façon illicite, soit par une mise en demeure du Préfet (que vous souhaitez contester devant le tribunal administratif), soit par une procédure de référé devant le tribunal judiciaire.
En cas d’installation illicite sur un terrain, il est conseillé d’envoyer immédiatement au Maire de la collectivité (commune ou intercommunalité) une lettre recommandée avec accusé de réception qui explique pourquoi vous n’avez pas d’autre choix que celui d’être installé sur ce terrain (par exemple, la fermeture de l’aire d’accueil pour travaux, une obligation légale non remplie, les aires d’accueil pleines autour, etc.) et qui reprenne les quatre points que nous proposons dans le modèle de lettre ci-dessous. Signez le courrier, gardez-en une copie avec l’avis de dépôt et l’accusé de réception de votre envoi. Quel que soit le lieu choisi, votre installation doit paraître propre et irréprochable. Faites des photos qui le montrent : bonnes conditions de sécurité, de salubrité et d’hygiène.
Un tel courrier, demandant au maire de vous assurer des conditions de vie décentes et sécurisées, n’autorise en rien à stationner, mais il peut contribuer à désamorcer l’un ou l’autre motif lié aux conditions de sécurité, d’hygiène et de salubrité qui pourraient être invoquées par le Préfet ou la collectivité devant un magistrat.
Cette lettre aborde les points suivants : la prévention incendie, le raccordement provisoire à l’eau potable et à l’électricité, ainsi que la collecte des ordures ménagères. Le but est de demander au Maire de prendre des mesures appropriées pour éviter les risques d’incendie, d’autoriser les raccordements provisoires et d’organiser la collecte des déchets.
Important : n’oubliez pas d’expliquer pourquoi vous vous êtes installés sur le terrain litigieux, et ce au début du courrier.
La loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité attribue à EDF la mission d’assurer le droit à l’électricité pour tous. Toutefois, la mise en œuvre de ce droit s’avère souvent difficile pour ceux qui ont pour habitat permanent une résidence mobile. La seule solution qui leur reste en pareille situation est d’engager une action contentieuse. Deux types de raccordement sont à considérer : le définitif et le provisoire.
Le Maire ou les services municipaux qui se prévalent de lui, peuvent s’opposer au raccordement définitif d’un terrain au réseau électrique en cas d’infraction aux dispositions d’urbanisme, notamment en cas de constructions irrégulières ou d’installation de caravanes / résidences mobiles. Les caravanes qui ne sont plus mobiles car posées sur le sol ou sur des plots de fondation, sont considérées comme des constructions. Elles doivent faire l’objet, à ce titre, d’une déclaration préalable ou d’un permis de construire. Un raccordement définitif au réseau ne pourra être accordé qu’à cette condition.
En l’état actuel du droit, il convient de rappeler que le Maire ne peut se prévaloir de l’article L111-12 du Code de l’Urbanisme ou de ses pouvoirs de police pour s’opposer à un raccordement provisoire quand bien même les caravanes sont installées sur un terrain de façon illicite ou irrégulière au regard des règlements d’urbanisme (Conseil d’Etat, avis n°266478 du 7 juillet 2004) ou en présence de constructions illicites.
Cependant, concrètement, les élus cherchent souvent à régler des contentieux d’urbanisme en utilisant leurs pouvoirs de police pour refuser un raccordement provisoire.
Important : Selon notre expérience, afin de ne pas voir sa demande requalifiée en demande définitive susceptible d’être refusée, il convient autant que faire se peut de faire valoir un mode de vie et d’habitat mobiles – « je rentre, je sors » – pour toute demande de raccordement provisoire et de fixer des dates de début et de fin du raccordement demandé (cela peut recouvrir quelques mois).
Télécharger le modele de lettre de demande de raccordement provisoire pour le Maire
Télécharger le modele de lettre de demande de raccordement provisoire pour ENEDIS
Les services d’ENEDIS invoquent, pour justifier leur refus de branchement provisoire, le cahier des charges signé avec les communes qui leur impose d’interroger le Maire et d’obéir à son injonction de rejet. Dans la mesure où le Maire ne peut théoriquement pas s’opposer à un branchement provisoire et où aucune contrainte technique n’empêche l’opération, le refus apparaît sérieusement contestable. S’ils persistent dans leur refus de raccordement provisoire, le demandeur peut adresser une réclamation au Directeur ENEDIS du lieu de consommation et, en cas d’échec, alerter le Médiateur ENEDIS qui tentera alors de concilier les positions de chacun.
Si la voie amiable échoue, comme nous l’avons malheureusement trop souvent constaté, il est conseillé d’engager les services d’un avocat afin d’assigner ENEDIS selon une procédure d’urgence devant le tribunal judiciaire (anciennement TGI) si les demandeurs vivent sur le terrain.
A chaque demande de raccordement provisoire auprès des services d’ENEDIS, il est fortement conseillé de solliciter l’accord du maire par lettre recommandée avec accusé de réception. Il arrive souvent que les communes se réfèrent aux dispositions relatives aux raccordements définitifs pour s’opposer à un raccordement provisoire. Par conséquent, en cas d’injonction écrite du maire auprès des services d’ENEDIS et/ou de réponse négative à votre courrier, il peut être envisagé de demander l’annulation de cette décision, juridiquement discutable, devant le tribunal administratif compétent (une procédure en référé est parfois possible si les requérants sont installés sur le terrain).
Si le refus du maire est annulé ou suspendu par le tribunal, mais que les services d’ENEDIS persistent dans leur refus de raccordement provisoire, par exemple en demandant de déposer une nouvelle demande (ce qu’il ne faut surtout pas faire), alors il sera nécessaire d’engager une nouvelle procédure en référé devant le tribunal judiciaire.
L’article L332-15 du Code de l’urbanisme permet à une collectivité d’exiger la réalisation et le financement de tous les travaux de viabilité et des équipements concernant la voirie, l’alimentation en eau, en gaz ou électricité, l’évacuation des eaux et matières usées, etc…
Cette obligation s’étend également au branchement des équipements individuels aux équipements publics notamment, aux opérations réalisées à cet effet en empruntant des voies privées ou en usant de servitudes. Concernant le raccordement au réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la contribution correspondant au branchement et à une fraction des frais d’extension du réseau (L.342-11 du code de l’énergie). Néanmoins, «lorsque l’extension de ces réseaux est destinée au raccordement d’un consommateur d’électricité en dehors d’une opération de construction ou d’aménagement, autorisée en application du code de l’urbanisme, la contribution correspondant à cette extension est versée par le demandeur du raccordement».
Enfin, la commune a la possibilité de demander au constructeur le financement de raccordements à usage individuel sur les réseaux d’eau potable ou d’électricité, situés sur des emprises publiques, dans une limite de 100 m. La partie située sur terrain privé, qu’il s’agisse du terrain du demandeur ou d’un passage par une servitude de droit privé, reste intégralement à la charge du demandeur. Est exclue du champ d’application de cette disposition toute opération de raccordement individuel aux équipements publics d’assainissement.
Le 27 décembre 2019, la loi dite “Engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique” a été promulguée. Au moment des débats, l’article 14 avait particulièrement inquiété l’ANGVC (notre association nationale) qui s’était associée avec l’association Droit au Logement (DAL) et avait manifesté devant l’Assemblée Nationale.
En effet, le texte prévoyait initialement un renforcement des pouvoirs de police du maire lui permettant, sans passer par le juge, de mettre en demeure, sous peine d’une astreinte administrative (à ne pas confondre avec une amende : ici, c’est la collectivité qui en demande la liquidation / le règlement via le Trésor Public) fixée à 200 euros par jour après le délai imposé par courrier, les personnes vivant dans un habitat dit “informel” – une caravane, un véhicule habité ou toute construction édifiée sans autorisation – de procéder aux travaux nécessaires pour mettre leur terrain privé en conformité avec les règles d’urbanisme applicables.
La plupart du temps, la formulation consacrée est « remise en état du terrain », ce qui sous-entend procéder à la démolition des constructions, enlever les terres stabilisées par des gravats et/ou retrait des résidences mobiles. Bref, ça concerne ce qui se rapporte à l’installation de leur logement en habitat mobile ou éphémère.
Malgré les protestations et une campagne d’interpellation des députés contre un dispositif répressif qui s’attaque directement au droit à la vie privée et familiale (notamment des Voyageurs et leur logement), qui sanctionne quiconque sans l’arbitrage ou le contrôle d’un juge, et qui s’ajoute à l’arsenal judiciaire en vigueur réprimant les infractions d’urbanisme, le texte final adopté fût encore plus sévère.
Ainsi le montant des astreintes fût alourdi à 500 euros par jour, bien qu’il fût plafonné à 25.000 euros. Cependant, les communes se sont vues accorder, en plus des astreintes, la possibilité d’imposer aux personnes visées la consignation d’une somme correspondant au montant estimé des travaux nécessaires pour remettre en état le terrain, y compris la démolition des diverses installations jugées illicites par la mairie.
A noter que la mise en œuvre de ces nouvelles prescriptions s’inscrit dans une tendance des collectivités d’éviter en urgence la décision d’un juge estimée risquée et/ou coûteuse – au détriment des droits fondamentaux des personnes visées – ce qui n’empêche nullement la commune ou l’Etat d’engager en parallèle des poursuites judiciaires, notamment pénales, prévues par l’article L.480-14 du Code de l’urbanisme, où le respect du droit à un procès équitable et du principe du contradictoire sont garantis.
Depuis fin 2019, la procédure d’astreinte prévue à l’article 481-1 du code de l’urbanisme permet donc aux maires de sanctionner par un cumul de sanctions les habitants qu’il juge indésirables, en les appauvrissant et en les excluant de leur politique d’habitat.
Si elle est restée inappliquée lors des périodes de confinement entre 2020 et 2021, nous nous inquiétons d’une montée en charge de l’application du dispositif depuis 2022.
Nous envisageons les astreintes susceptibles d’être prononcées et liquidées en droit de l’urbanisme, étant donné le nombre de cas pratiques que nous connaissons. Cependant, notons que ce type d’astreintes trouve également à s’appliquer en droit de l’environnement (C. envir., art.216-9, 514-9, 514-10 et 571-25) et en droit de la consommation (C. conso., art.141-1).
L’astreinte accompagne une condamnation résultant d’une infraction aux règles relatives au permis de construire ou au document d’urbanisme. Le plus souvent, il s’agit pour le juge, outre de prononcer une amende à l’encontre du délinquant, de le convaincre effectivement et volontairement d’exécuter une obligation de faire (remise en état d’un terrain par exemple ou arrêt de travaux illicites). Le prononcé et la liquidation de cette astreinte sont régis par les articles 480-7 et suivants du code de l’urbanisme (CU).
L’hypothèse la plus commune est celle dans laquelle une personne (physique ou morale) a exécuté des travaux au mépris des règles d’urbanisme. D’assez lourdes peines d’amende, voire d’emprisonnement en cas de récidive, peuvent être prononcées (CU, art.480-4). Le tribunal statue :
Les décisions rendues « constituent des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite, et non des sanctions pénales ». Elles fixent un délai pour l’exécution de cette mesure (CU, art.480-7, al.1).
Dans un souci d’efficacité, le juge peut assortir (le caractère est facultatif) sa décision d’une astreinte de 500 € au plus par jour de retard. C’est une mesure destinée à contraindre à exécution le débiteur. Elle est prononcée par une juridiction pénale (et non par une juridiction civile comme un juge des référés).
Il s’agit d’une mesure comminatoire, c’est à dire un procédé de contrainte, destinée à inciter le bénéficiaire des travaux à exécuter la décision juridictionnelle. Elle ne saurait dès lors être regardée ni comme une réparation civile, ni comme une peine, ni encore comme ayant pour objet de réparer le préjudice subi par la commune. Elle n’est donc pas soumise à la prescription de la peine (prescription civile de dix ans), et son recouvrement est possible pendant 30 ans en application de l’article 2262 du code civil. L’article 480-6 du CU exclut par ailleurs du bénéfice de l’amnistie les mesures de restitution, donc l’astreinte.
Elle diffère de l’astreinte civile par le fait qu’elle ne peut pas être prononcée à titre provisoire. De plus, lors de sa liquidation par le tribunal, elle peut être supprimée ou modérée (art.480-7). Elle est par ailleurs, en vertu de l’article 480-8, liquidée par le maire (ou par l’État), alors que l’astreinte civile est liquidée par le tribunal.
Cela relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond. Toutefois, ces derniers ne peuvent dépasser le montant légal déterminé par l’article L. 480-7 du CU (500 euros par jour de retard au délai d’exécution fixé). Son usage reste d’appréciation délicate : trop faible, l’astreinte n’a que peu d’effet dissuasif ; élevée, elle constitue un moyen de pression efficace mais impose un recouvrement rapide sous peine de devenir insupportable pour le bénéficiaire des travaux.
L’astreinte commence à courir à l’expiration du délai imparti au condamné pour exécuter la décision de démolition ou de remise en état prononcée. A défaut d’indication de délai, l’astreinte court lorsque la décision juridictionnelle est définitive. Elle est due jusqu’au jour où l’intégralité des mesures de restitution ont été effectuées (ou jusqu’au jour de la délivrance d’un permis de régularisation). Notons que seul le bénéficiaire des travaux ou de l’utilisation irrégulière du sol au moment des faits peut être condamné à l’exécution des mesures de restitution, et par suite, au paiement d’une astreinte (même s’il a perdu ensuite cette qualité, par exemple en raison de la vente ultérieure du bien).
Tout nouvel acquéreur pourra être tenu d’exécuter personnellement les obligations imposées par la décision de condamnation seulement s’il a participé à la commission des faits et a été mis en cause dans l’instance. A défaut, il ne pourra être tenu d’exécuter personnellement les obligations imposées par la décision de condamnation. L’astreinte va ainsi continuer à courir pour le vendeur, bénéficiaire initial des travaux irréguliers, même s’il n’est plus le propriétaire.
Si l’exécution de la mesure de restitution n’est pas intervenue dans l’année de l’expiration du délai fixé par la décision de condamnation, l’article L. 480-7, al. 3 du CU autorise le tribunal qui a prononcé la décision à relever à une ou plusieurs reprises le montant de l’astreinte. Il peut alors dépasser le montant maximal de 500 euros par jour de retard.
Les remises gracieuses ne peuvent être accordées au redevable que par les comptables chargés du recouvrement, après avis de l’autorité qui procède à la liquidation de l’astreinte. Lorsque la liquidation est effectuée par le maire, la commune n’a aucune possibilité d’accorder au redevable une telle remise. Lorsque la liquidation est faite au profit de l’État, le préfet, ordonnateur, n’a pas plus compétence pour accorder une remise gracieuse de l’astreinte.
En revanche, lorsque la créance est établie et recouvrée au profit de l’État, une telle remise peut être consentie (article 91 du décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, et des articles 10 et 11 du décret n°92-1369 du 29 décembre 1992) par le trésorier-payeur général si le montant n’excède pas 76 000 euros, par le ministre du budget pour des remises gracieuses dont le montant est compris entre 76 000 euros et 110 000 euros (entre cette somme et 150 000 euros, avis obligatoire du comité contentieux).
Il est possible de saisir le juge pénal qui a prononcé la condamnation initiale, dont émane la condamnation (avec astreinte), afin de solliciter le reversement et même de dispenser du paiement d’une partie des astreintes au bénéfice de la personne à qui l’injonction a été adressée « pour tenir compte de son comportement » et « des difficultés qu’elle a rencontrées pour l’exécuter ». Cela peut tenir de difficultés financières graves, de la vente du bien concerné ou du délai d’obtention d’une autorisation de régularisation…
Pratiquement, il conviendra de demander le reversement ou la dispense partielle par requête au service de l’exécution des peines qui transmettra alors la demande au juge pénal. Ce dernier transmettra à son tour la demande au service des impôts en charge du recouvrement qui émettra un avis sur la demande.
Selon l’article 480-8 du CU, « les astreintes sont liquidées au moins une fois chaque année et recouvrées par l’Etat, pour le compte de la ou des communes aux caisses desquelles sont reversées les sommes perçues, après prélèvement de 4 % de celles-ci pour frais d’assiette et de recouvrement ».
Le redevable à qui a été adressé un titre exécutoire émis par l’autorité administrative peut le contester de deux manières.
→ Il peut tout d’abord faire une opposition à poursuites afin de contester la validité en la forme du titre exécutoire. Le contentieux de cette validité relève, aux termes de l’article 311-12-1 du code de l’organisation judiciaire, du juge de l’exécution institué par la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution. Il relève du comptable chargé du recouvrement de défendre ce contentieux.
→ Il peut ensuite former une opposition à exécution du titre en contestant alors l’existence du titre exécutoire qui lui a été notifié, son montant ou son exigibilité. Il appartient à la juridiction répressive de se prononcer puisque la créance d’astreinte résulte de la décision de condamnation.
Depuis la loi ALUR du 24 mars 2014, le juge pénal peut ordonner l’exécution provisoire des mesures de restitution qu’il prononce. S’agissant de l’astreinte, en cas d’exécution provisoire décidée par le juge, l’autorité administrative peut ainsi immédiatement recouvrer l’astreinte prononcée, sans attendre l’expiration du jugement d’appel. La loi précise qu’elle peut même y procéder « au moins une fois chaque année ». La liquidation fréquente de l’astreinte est de nature à être incitative. L’exécution provisoire est une arme supplémentaire mise à disposition de l’autorité administrative. Un recouvrement fréquent présente l’intérêt de mettre fin à la pratique consistant à liquider l’astreinte de nombreuses années après son prononcé alors que le montant réclamé est devenu considérable.
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