Association Départementale des Gens du Voyage Citoyens de Loire Atlantique
Face à la saturation des aires d’accueil et à l’absence de solutions alternatives, de nombreuses familles se retrouvent contraintes au stationnement illicite. Sur des parkings, des terrains vagues ou des friches industrielles, elles vivent dans l’insécurité permanente, exposées aux expulsions, aux amendes et à la stigmatisation. Cela pose des problèmes également aux propriétaires privés de ces friches car cela met en difficulté la revente des sites.
Nous avons le cas d’une famille qui, en 4 mois, a dû déménager 8 fois, peut-être même plus car certaines fois, elle ne restait que 48 heures sur un emplacement. A peine arrivée, la police était déjà là. Et pourtant on était en plein hiver. Ce n’est pas une vie, l’errance n’est pas choisie, elle est subie.
Il est essentiel de travailler sur l’identification des friches industrielles ou commerciales abandonnées afin de les utiliser comme espaces de stationnement autorisés et accompagnés ou mieux : de les transformer en terrains familiaux locatifs ou privatifs, dans le but de répondre aux besoins des voyageurs tout en respectant les propriétaires de ces sites.
Tout le monde y gagnerait :
On a un très bel exemple vertueux où un propriétaire de friche industrielle s’est mis d’accord avec une famille de voyageurs. Il a mis à disposition deux algécos et a autorisé quelques caravanes autour de son usine. En contrepartie, la famille paye l’eau, l’électricité et assure le gardiennage du bâtiment industriel. Tout se passe très bien et chacun y trouve son compte.
Il est nécessaire que se mettent autour de la table l’État, la métropole, la Chambre de Commerce et d’Industrie et le milieu associatif afin de réfléchir à des solutions plus pérennes et plus sécurisantes pour les voyageurs comme pour les propriétaires.
Comme le reste de la population, les gens du voyage vieillissent et les aires d’accueil ne sont pas prêtes. Conçues pour des populations itinérantes de passage, elles ne répondent pas aux besoins des personnes à mobilité réduite ou en perte d’autonomie.
Comment faire par exemple quand on tombe malade et qu’on est en fauteuil roulant ? On ne peut pas monter ou descendre de la caravane, on ne peut pas circuler à l’intérieur… La solution c’est le mobil-home car il est totalement aménageable pour accueillir une personne à mobilité réduite ou un lit médicalisé, or il est interdit d’en mettre sur les aires d’accueil car assimilé à un habitat « pérenne ». Un blocage incompréhensible pour les voyageurs.
C’est la situation dans laquelle s’est retrouvée Joëlle, une dame âgée qui, suite à une maladie, a été contrainte à vivre en fauteuil roulant. Elle ne pouvait plus sortir de sa caravane, les soins de l’infirmière étaient impossibles. Comme tous ses enfants étaient sur l’aire, elle ne voulait pas en partir. Nous avons mené un combat pour qu’elle puisse avoir le droit d’installer un mobil-home sur son aire d’accueil. Elle a pu ainsi retrouver son autonomie et recevoir les soins dont elle avait besoin.
Les gens du voyage sont des gens comme les autres, ils ont les mêmes problèmes de vieillissement et de santé, il faut que les aires d’accueil s’adaptent à ces évolutions.
Il est nécessaire d’autoriser et de créer des logements adaptés sur les aires d’accueil, ainsi que de mettre aux normes les sanitaires, afin de permettre aux personnes âgées, handicapées ou en fin de vie de vivre dignement et de bénéficier des soins dont elles ont besoin.
La modification du PLU ou PLUI prend entre 3 et 5 ans. Une fois celle-ci acceptée – ce qui n’est pas du tout gagné – il faut encore attendre 1 an pour obtenir une réponse concernant le permis de construire, et ensuite, il faut encore attendre avant d’être raccordé à l’eau et à l’électricité.
Si tout se passe bien, il faut donc entre 4 à 6 ans, voire plus, pour obtenir l’autorisation de vivre sur son propre terrain. Si et seulement si le maire le veut bien et que des associations de voisinage ne font pas échouer le projet. Pour vous donner une idée, pour Yannick, le président de notre association, ça a pris 15 ans…
Ces obstacles administratifs et la pénurie de places dans les aires d’accueil posent des défis majeurs aux familles vivant en habitat mobile, nécessitant une réponse politique et sociale appropriée pour garantir leurs droits et leur dignité.
« En ce moment, on accompagne une famille qui a acheté en toute connaissance de cause un terrain agricole en zone naturelle, déjà raccordée à l’eau, à Vigneux-de-Bretagne. Ils avaient conscience en achetant ce terrain qu’ils ne pourraient pas y installer leur habitat mobile. Ils ont acheté avec l’espoir d’obtenir une modification du Plan Local d’Urbanisme (PLU), ce qui est possible et dépend du Maire de la commune.
Et bien, on leur refuse carrément l’accès à leur propre terrain. La Maire a publié un arrêté municipal pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de « gens du voyage » dans sa commune. L’arrêté empêche les « Gens du Voyage », c’est écrit noir sur blanc, de stationner sur sa commune, que ce soit sur la voie publique ou sur un terrain privé. C’est-à-dire que tu ne peux même pas t’y arrêter sans être en infraction, même sur ton terrain ! En 42 ou 43 sur la commune de Blain, il y avait eu un arrêté de ce genre qui interdisait aux nomades de s’arrêter dans la commune avec leurs chevaux et leurs roulottes. Sinon ils étaient immédiatement passibles de prison. C’était pendant la Deuxième Guerre mondiale. Aujourd’hui cibler une population spécifique, c’est extrêmement grave, c’est totalement stigmatisant et discriminatoire et c’est puni par la loi. Nous travaillons actuellement avec nos avocats pour faire annuler cet arrêté.
Ce que dit la Maire, c’est qu’il y a des aires d’accueil dans sa communauté de communes – qui en réalité sont pleines – donc ne venez pas chez moi.
En stationnement illicite, cette famille erre d’un parking à l’autre, expulsée à chaque fois, alors qu’elle a un terrain bien à elle. Ces voyageurs sont itinérants, ils veulent juste y passer la période hivernale. Ils ont mis toutes leurs économies dans ce terrain sur lequel ils ne peuvent rien faire. »
« L’autre problème c’est le défaut de conseil de notaires peu scrupuleux qui font la vente de terrains agricoles en connaissant le public, en sachant ce qu’ils aimeraient en faire. Ça ne les dérange pas de faire la vente quand même. Ils ne leur disent pas “attention, n’achetez pas ce terrain, vous n’en ferez rien” alors qu’ils ont un devoir de conseil.
Il faut bien préciser aussi que les gens du voyage se font souvent avoir et achètent des terrains agricoles bien plus chers que leurs vraies valeurs, ce qui fait aussi monter les prix pour les agriculteurs désireux de s’installer.
Cette famille fait des tonnes de démarches depuis 2 ans pour être dans la légalité mais impossible de se mettre sur son propre terrain. Par contre, les voisins d’à côté ont pu mettre un chalet. Il y a eu une pétition contre les caravanes, pas contre le chalet… C’est une volonté politique, la Maire bloque l’installation des gens du voyage. Ils ont passé tout l’hiver en stationnement illicite sur des friches industrielles. Si on réglait le problème de leur terrain, ça ferait une dizaine de caravanes en moins en stationnement illicite sur les friches industrielles. »
« Les familles ont finalement trouvé une friche industrielle. Le propriétaire, au lieu de demander un référé d’expulsion, leur a demandé de nettoyer la friche et de faire le gardiennage de ses bâtiments, tout le monde s’y retrouve en attendant de trouver une solution pour leur terrain. »
Christophe Sauvé de l’ADGVC44
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